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Programme scientifique

Le programme « Libertés » (2018-2023) porte sur la description et l’analyse des « lieux » et formes de la liberté, et de ses moments de crise, dans les différents domaines de l’art, de la littérature, de la vie sociale et politique ainsi que dans les pratiques interculturelles et multiculturelles. Il s’organise selon trois grands axes : Culture et politique, Écritures et autres pratiques discursives, Identités et genres.

AXE 1. Culture et politique, études coloniales et postcoloniales
La liberté s’écrit le plus souvent au pluriel : « libertés fondamentales » (de conscience, de culte, de création, d’expression, d’association, d’enseignement, de circulation, etc.) — autant de particularisations de LA liberté, que celle-ci soit comprise comme autonomie de la « raison » (Kant) ou comme le pouvoir qu’est la subjectivité de transcender le monde établi en ouvrant le possible comme tel (Sartre). Suivant cette perspective, la liberté est le pouvoir humain de création de formes inédites de l’être (social, esthétique, éthique, pédagogique, politique, économique), et, en négatif, le pouvoir de dépassement des formes instituées qui tiennent lieu de « réalité ». La liberté comme structure « anthropologique » est la condition de possibilité des libertés politiques, et, plus généralement, de la conscience utopique (Mannheim) qui œuvre à leur déconstruction et reconstruction permanente. De nos jours, le retrait de la liberté au singulier demande à être repensé en lien avec la question de la « crise de la civilisation » (Edgar Morin) : la recherche proposera une description et une analyse des « lieux » et des formes de la crise de la liberté dans les différents domaines de l’art, la littérature, la vie sociale et politique ainsi que dans les pratiques interculturelles et multiculturelles. Elles seront ainsi amenées à examiner, entre autres, les rapports entre la liberté et les libertés, la liberté et l’aliénation, la liberté et l’autorité de la norme, la liberté et l’utopie, la liberté et le possible.
On s’intéressera notamment à la façon dont s’articulent diversité et unité culturelles et nationales dans les démocraties constitutionnelles : la liberté politique complète (Kelsen), déclinée comme synonyme de souveraineté, pose la question de la compatibilité entre démocratie nationale, fédéralisme et autodétermination (individuelle et collective), voire celle de la décolonisation interne.
Dans le domaine de la création, on étudiera comment les pratiques (d’écriture, de performance ou de réception) et les discours s’inscrivent dans des conditions sociales et politiques propres aux contextes totalitaires, de ségrégation/apartheid, d’exil, de guerre ou de privation des libertés fondamentales — ou s’en démarquent. On pourra revenir sur les moyens propres à certains genres et certaines époques de concentrer la critique du pouvoir ou l’exaltation des identités nationales.
Depuis janvier 2019 fonctionne un groupe d'étude et de recherche sur le monde Anglophone et le Libéralisme économique et politique (animé par Anthony Castet, Nathalie Champroux, Alexis Chommeloux et Stéphane Porion), avec un séminaire mensuel "Le libéralisme dans tous ses É/états". Depuis 2020 ce séminaire transversal est organisé conjointement avec un autre laboratoire de l'U. de Tours, l'IRJI (Institut de Recherche Juridique Interdisciplinaire, EA 7496).

AXE 2. Écritures et autres pratiques discursives
Cet axe comprend deux aspects essentiels : liberté de création et liberté d’expression. Que signifie la liberté créatrice par rapport aux normes, canons et modèles esthétiques et par rapport à la contrainte formelle qui peut aussi bien favoriser paradoxalement l'expression d'une singularité et d'une personnalité d'auteur ? À ce titre, comment envisager la liberté du traducteur — lui-même auteur à part entière —, celle du metteur en scène ou de l'acteur, celle de l'auteur d'une adaptation par rapport à l’œuvre source ? Dans quelle mesure le cadre juridique du droit de l'auteur, susceptible de garantir au créateur la protection de son travail, représente-t-il un frein à la liberté de création ? De même, dans la perspective de la réception de l’œuvre, la liberté d'interprétation peut-elle être limitée par l'esprit de l’œuvre et l'intention de l'auteur ?
L’autre versant, celui de la liberté d’expression, est représenté par le rapport du créateur, de l’écrivain et de ses lecteurs, de l’artiste et de son public à la censure : comment la contourner, comment faire passer les idées et triompher l’esprit de liberté ?
Cet axe fédère donc diverses recherches dans le domaine littéraire et artistique :
– traduction et transferts culturels
– création et interprétation, en arts du spectacle, musique et musicologie
– écriture de soi (lettres, mémoires, journaux) et « genres en liberté »: de ce champ d'étude relèvent les colloques biennaux sur "l'épistolaire antique et ses prolongements européens", de l'Antiquité à nos jours (organisés par les latinistes de Tours depuis 1998).
Depuis septembre 2021 fonctionne un séminaire de recherche mensuel de théorie littéraire "Écritures et concepts en mouvement", animé par Michaela Enderle-Ristori, Maryline Heck, Anna Krykun, Adrienne Janus, Maria Teresa Ricci, Carlos Tous et Anne Ullmo.

AXE 3. Identités construites et déconstruites, genres
Ce troisième axe propose une réflexion originale dans le domaine des études culturelles, selon trois directions : genre (gender), représentations du corps et rapport homme/nature.
– « Genres et liberté(s) » : études sur le genre, interrogation sur la liberté des individus et des groupes face à la doxa sociétale (travaux sur les minorités et les groupes discriminés, notamment les femmes et les homosexuels)
– « De la liberté par extensions : automates, avatars et artifices » : ces travaux sur la représentation du corps, bouleversée par les innovations technologiques, proposent de conjuguer arts de l’image, analyse discursive et textuelle. En 2017-18 un atelier de recherche animé par les anglicistes Didier Girard, Adrienne Janus et Anne Ullmo, était consacré au thème : « Les sens de la liberté : sensations, sensibilités, simulations » (sur la réappropriation du sensoriel dans un monde de plus en plus dématérialisé).
– Homme et nature : 1°) axe transversal de la MSH "Humanités et environnement" (Florent Kohler, ICD / José Serrano, CITERES), avec une réflexion sur sur "l'écologie de la réconciliation"; 2°) programme franco-italien ERA "Ecologia Roma Antica" (Élisabeth Gavoille, ICD / Ida Gilda Mastrorosa, Université de Florence, SAGAS).